diamonds

Un amour de Bijou, Jacques

C’est aujourd’hui mon anniversaire.

Je suis maintenant une sexagénaire… encore sexy. Enfin, je l’espère.

J’étais si belle dans les années 80.

Tu le sais, toi à qui je me confie depuis tant d’années.

A l’époque, tout le monde m’appelait Bijou.

J’aimais les bijoux et les hommes. Dans cet ordre.

D’ailleurs, mes amies disaient de moi que j’étais une croqueuse de dix amants.

Elles exagéraient à peine.

Il est vrai qu’avec mon look glam-rock, jupe courte, ceinture, boucles d’oreille dorées et mes

cuissardes noires, j’avais tout d’une bottée fatale.

Au cours de ma vie, j’ai fait de belles et nombreuses rencontres…

surtout nombreuses.

Comme beaucoup de femmes, j’ai longtemps cherché un homme d’exception.

Je dois reconnaître que, le plus souvent, je n’ai malheureusement croisé

que des hommes déception.

Trop naïve, j’ai attendu que l’un d’entre eux me demande de l’épouser.

Mais, au lieu de me conduire vers l’autel, ils préféraient m’emmener

directement à l’hôtel.

Romantique, je rêvais d’un amour éternel.

Nous avons toutes connu la fougue des premiers émois.

Une passion qui nous emporte vers les étoiles, et puis la passion s’étiole.

D’abord, on se veut et on s’enlace, puis on s’en lasse et on s’en veut (1)

De matin en matin, les petits-déjeuners se succèdent et nous constatons

que le café est tiède et nos sentiments à l’égard de l’autre vont décroissant.

Ainsi, les mois passent et l’émoi passe.

Mais j’ai tout de même vécu une belle histoire d’amour,

quand j’ai rencontré mon Théophile.

Il était banquier. J’étais venue lui demander un crédit.

Il m’avait fait des avances. Je les avais acceptées.

Théophile était amateur de thé.

Pour ma part, j’ai toujours préféré un café bouillant à un chaste thé.

Mon Théophile me faisait de l’effet … surtout quand il retirait les miens.

Vraiment, je frissonnais quand Théo ôtait mes bas.

Avec lui, j’étais ravie au lit et … pas seulement le lundi.

Théo était un tendre. Moi, j’aimais sa tendresse.

J’adorais que durent nos moments doux (2)

Ensemble, nous avons vécu de belles et trop courtes années.

Jamais un nuage dans notre ciel de lit.

Mon Théo est parti un matin de mai, après une dernière nuit d’amour.

Le docteur a dit qu’il était mort d’une amouragie interne.

Pour son enterrement, cet homme, sans concession, qui ne croyait pas en Dieu,

avait exigé un service athée.

J’étais dévastée. J’avais perdu mon grand amour.

Sur sa tombe, j’ai déposé des pleurs.

Après lui, pour trouver l’oubli, les hommes ont défilé dans ma vie.

Un cordonnier me roula des galoches

Un psychanalyste russe m’allongea sur son divan terrible

Un opticien voulut me donner une bonne correction

Un musicien me surnomma sa nymphonie fantastique

Un cuisinier m’agaça vite avec ses petites maniques

Je me suis même piquée d’un toxico… plutôt bon shit bon chanvre

et, bien sûr, en automne, je ne résistai pas à un marin chaud, chauds les marins

Aujourd’hui, je suis seule et en panne des sens.

Mes meilleures amies sont des piles alcalines pour un vibrant câlin.

Et, dans ce monde robotisé, je me contente de joindre l’outil à l’agréable.

Je ne cherche plus de compagnon. Les hommes que je croise sont trop vieux,

et je crains la dérive des incontinents (3)

Mon visage s’assèche et devient de plus en plus à rides.

Je deviens bonne à rien après avoir été capable de tout.

Voilà, mon cher journal, ma confession s’achève, ici.

Pour toi, une fois encore, je me suis mise à nu.

Une confession, c’est toujours un déshabillé de soi.

(1) Louise de Vilmorin

(2) Bashung

(3) Gordon Zola ( Erick Mogis)
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