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Au pays du bonheur, Annie

Installée sur une chaise longue, je profite de l’ instant et de la douceur du soleil. A côté de moi, sur un guérison, une lettre commencée hier, qui attend une conclusion, mais rien ne presse… Il fait si beau, tout est si calme. Seuls quelques oiseaux, quelques abeilles, des rires d’ enfants dans le lointain. Je m’ assoupis un moment.
Sur ma droite, la grande allée ombragée par des pins parasols qui mène au petit portillon en bois, repeint tous les étés car soumis aux embruns et à l’iode. Si les oiseaux se taisaient un peu, le bruit du ressac serait bien perceptible !
Le ciel d’ un bleu idéal, sans un nuage, se confond avec le bleu de la mer. Là – bas vers l’horizon, le parfum de l’ océan se mêle à celui des roses en pleine éclosion et à celui, envoûtant du jasmin. Ce soir, au coucher du soleil, ce sera le chèvrefeuille qui dominera et gagnera la partie…
Sur ma gauche, sous la tonnelle, la grande table recouverte d’ une belle nappe blanche brodée est prête pour accueillir apparemment bon nombre de convives. La vaisselle en porcelaine blanche ornée de motifs floraux dorés, les présentoirs à tartes et petits fours, les serviettes assorties à la nappe ont été sortis alors qu’on n’ est pas dimanche !
Les chaises de jardin, disparates, ont été disposées tout autour de la table. Plus tard, il y aura également de grandes carafes de jus de fruits, des coupes pour les glaces ou sorbets, pour les salades de fruits frais, plusieurs tartes  » maison », des petits fours du pâtissier, lorsque tous les invités seront là .
Plus loin, sur la terrasse du grand chalet, lasuré cet été comme tous les ans, sont assises sur des chaises basses, ma grand-mère, tenant sur ses genoux un nourrisson tout de bleu vêtu et ma mère qui tricote de la layette. Elles chantent ensemble un air entraînant qui fait rire aux éclats le  bambin ! La scène est délicieuse et pleine de fraîcheur.
Soudain, la clochette du grand portail retentit et annonce les premiers visiteurs qui discutent gaiement entre eux, même s’ ils ne se sont jamais vus !
D’ abord mon amie Sylvie, magnifique dans sa robe longue, vaporeuse qui dévoile ses  jolis mollets fins et dorés. Ses beaux cheveux bouclés, blond – vénitien, ses taches de rousseur, ses yeux clairs, son éternel sourire éclatant et ses dents  » du bonheur ».
Nous avons tant de choses à nous raconter !
Juste derrière elle, se tient, majestueux, le grand Philippe avec ses belles bacchantes bien entretenues, sa voix théâtrale et une plaisanterie en préparation ! Son père l’accompagne, même portrait en plus âgé, sourire bien accroché et l’ oeil rieur comme d’habitude !
Je leur saute au cou, ça fait si longtemps que nous nous sommes vus ! Pascale ne les accompagne pas, c est étonnant …
Puis défilent, Denise, Jeanine, les meilleures amies de ma mère qui m’ ont offert mes premiers livres quand j’ ai su lire. Puis, mon adorable oncle Albert, mon beau frère Eric qui en a profité pour aller se baigner et qui secoue ses cheveux en s’ ébrouant comme un jeune chien histoire de me faire râler, bien sûr !
Arrivent ensuite groupées, des collègues de l’ hôpital de Poitiers, Viviane, Corinne et Michelle … Elles se racontent des blagues hilarantes encore une fois et rient à gorge déployée… Je les adorais celles là aussi .
Surgissent en même temps ,Marie-Christine et son frère Jean -François, puis, mes premières amies de lycée, Lina, Francine et Marie-Noëlle… Nous pleurions  ensemble et nous réconfortions les unes  les autres, le Lundi soir à l’ internat .
Personne n’a changé, pas une ride, pas de cheveu blanc, c’ est étonnant ça aussi !
Il y a là aussi des personnes dont j’ ai oublié le nom mais que je reconnais. Je sais que je les ai côtoyées, soignées, aimées… nous étions  proches.
Je reconnais tout à coup plusieurs de mes professeurs de lycée, certains m’ ont beaucoup marquée, m’ ont redonné confiance en moi, je les respectais profondément. Pierre mon ancien entraîneur de gymnastique qui m’ appelait  » petit morceau de caoutchouc  » et enfin, ma copine de colonie de vacances Annie qui habitait Biarritz et qui est devenue professeur agrégée de lettres à Bordeaux. Je l’ admirais et pouvais l’ écouter parler des heures et des heures ! Qu’ est ce  qu’ on a pu rire ensemble !  Je vais de l’ un à l’ autre pour leur dire ce que je n’ ai pas eu le temps de leur dire, les embrasser et les serrer dans mes bras encore une fois.
Dans ce jardin, règne une atmosphère chaleureuse, sympathique…Il y a aussi beaucoup d’ amour et de  bonheur. Je passe du temps avec ma grand-mère et ce beau bébé en bleu qui s’ appelle François. Je les touche et les caresse, j’ ai beaucoup de mal à me détacher d’ eux.
Ce joyeux brouhaha s’estompe, les silhouettes finissent par disparaître tout à fait …
C’ est la voix de ma mère qui me réveille brutalement : « encore en plein soleil, ma pauvre fille ! Tu trouves que tu n’ as pas encore assez de rides ! »

J’ émerge à regret de mon joli rêve, des larmes de bonheur ruissellent sur mes joues, j’étais si heureuse de les retrouver pour ce goûter, de les avoir réunis un instant, eux qui ne se connaissaient pas forcément. Ma grand- mère aurait 116 ans, le petit François 35, les autres à peu près mon âge actuel… Je les laisse repartir, pas sûre que nous nous retrouvions un jour, mais en tout cas, je suis chanceuse de les avoir rencontrés et connus, ils continueront à m’ accompagner où que j’ aille, bien au chaud dans mon coeur et ma mémoire .

Voilà ma vision d’ un moment de bonheur, d’ apaisement, empreint de nostalgie, regrets et aussi de beaux souvenirs apportés par un simple rêve récent .

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